Les résultats de l'autopsie arrivèrent quelques jours avant l'inhumation. Le corps de Matthew avait été transféré vers sa Californie natale, où John Kisko et Peter Haynes, comme la plupart des physiciens américains de XENO1000, ainsi que Giovanna Marsi, se rendirent pour lui rendre un dernier hommage. Cristina n'avait pas pu aller à San Francisco pour l'enterrement, à son grand regret. Mais ce jour-là, elle se jura qu'elle trouverait qui avait fait ça. Cristina avait décidé qu’elle retrouverait l’assassin de celui qui était devenu son ami, et qui lui avait appris tant de choses.
Matthew
Donnelly, 47 ans, avait reçu un coup avec un objet contondant au niveau des vertèbres
cervicales ayant provoqué une perte de connaissance immédiate. Son corps avait
ensuite était soumis, durant environ cinq minutes, à une atmosphère appauvrie
en oxygène, qui pouvait laisser croire à une anoxie accidentelle. La cause de
la mort était une asphyxie, mais non accidentelle.
Le
rapport du médecin légiste était concis et très clair. Un meurtre avait été
commis dans l'enceinte du laboratoire souterrain du Gran Sasso. La clé à
molette retrouvée au sol non loin des grilles de ventilation avait de l'ADN de
Matthew Donnelly à sa surface et avait été utilisée pour dévisser les deux
bouteillons de xénon dans la salle de stockage des gaz.
Les sept
scientifiques présents ce soir-là au laboratoire souterrain avaient
interdiction de quitter le territoire italien. Certains d'entre eux auraient
pourtant souhaité assister aux derniers hommages rendus à leur collègue. Les
premiers furent convoqués au commissariat de L'Aquila deux jours avant
l'enterrement de Matthew. Ils étaient reçus un par un dans le bureau d'un
inspecteur qui n'avait jamais vu autant de scientifiques dans toute sa
carrière, mis à part des médecins légistes. Derrière l'inspecteur se tenait
debout un homme de grande taille, les cheveux très bruns presque gominés, beau
costume, la petite quarantaine. A chaque audition, l'inspecteur débutait de la
même façon, en se présentant, puis aussitôt après ajoutait en désignant l'homme
brun debout derrière lui :
— Voici
l'agent Tom Hooper, du FBI, de Washington. L'agent Hooper est ici pour
investiguer sur la mort de Matthew Donnelly. C'est lui qui dirigera l'enquête,
en collaboration avec la police judiciaire italienne. Il s'agit de la procédure
lorsqu'il y a un homicide ou un suicide d'un ressortissant américain sur le
territoire italien. Je vais donc le laisser conduire l'entretien.
Puis il
laissait la parole à l'agent Hooper.
Chacun
des sept chercheurs et ingénieurs présents au laboratoire souterrain à
22h45 le soir du 24 février fut interrogé tour à
tour par Tom Hooper durant une bonne heure. L'inspecteur de la police italienne
se tenait en retrait et ne disait pas un mot, l'air parfois accablé comme se
demandant à quoi il pouvait bien servir. Mais la procédure devait être suivie,
il devait être présent, c'était une enquête collaborative comme on disait. En
réalité, la PJ n'avait rien à faire, le FBI avait complètement pris les choses
en main. L'agent Hooper avait été envoyé seul dans ce coin reculé d'Italie dès
que le décès non naturel de Matthew Donnelly avait été annoncé par la police
judiciaire aux autorités, dans la nuit du 24 au 25 février, suite au
signalement des Carabinieri. Il n'avait même pas pu refuser cette mission, il
devait simplement obéir à l'ordre qui lui avait été donné. Tom Hooper avait dû
faire ses valises très vite pour prendre un avion quelques heures plus tard
pour Rome. Le Bureau faisait bien les choses. Les agents étaient envoyés avec
le strict minimum puis on leur faisait parvenir par transport spécial leurs
affaires personnelles plus volumineuses.
Tom
Hooper avait pour mission de rester sur place tant que l'enquête ne serait pas
bouclée. Il rendait compte à ses supérieurs à chaque fin de journée. Il avait eu accès non seulement aux rapports des
médecins légistes et de la police scientifique mais il avait pu voir lui-même
le corps de Matthew Donnelly juste avant son transfert. Ce qu'il avait vu
l'avait convaincu de la justesse du rapport. Il savait déjà quelle piste il
fallait suivre pour comprendre ce qui s'était passé : chercher le mobile.
Tom
Hooper n'avait pas été choisi au hasard par le Bureau pour mener cette enquête.
Il avait rejoint le FBI à Washington depuis un peu plus de deux ans, après
s'être fait remarqué dans la section de la police scientifique de Chicago, où
il avait résolu un cas extrêmement délicat, sur lequel était également
intervenu le FBI mais sans succès. C'est lors de cette enquête que les
instances du FBI lui avaient proposé de les rejoindre. Après cinq ans passés
dans la police scientifique de l'Illinois, Tom Hooper avait souhaité élargir
son horizon, et rejoindre le bureau fédéral d'investigation était une belle
promotion, surtout qu'il resterait sur des enquêtes spéciales impliquant des
scientifiques ou des environnements de recherche. C'était sa spécialité depuis
son entrée dans la police de Chicago. L'enquête qu'il avait réussi à éclaircir
d'une main de maître concernait la disparition d'un spécialiste de physique nucléaire,
sur fond de vol de documents confidentiels concernant une installation de
stockage de déchets nucléaires. C'est Hooper qui avait eu l'idée de mesurer la
radioactivité dans la maison du disparu et avait pu retrouver ainsi des objets
contaminés qui ne pouvaient provenir que du centre de stockage. De fil en
aiguille, on avait pu comprendre le rôle de ce vieux professeur dans la chaîne
d'espionnage qui s'était organisée pour le compte d'une organisation écologiste
radicale.
Dès que
Tom Hooper était arrivé à L'Aquila, il s'était rendu immédiatement aux bureaux
de l'INFN avec la voiture de location qu'il avait prise à l'aéroport, une
grosse cylindrée bleu azur, sans passer voir les autorités policières. Il avait
demandé à ce que le responsable de l'enquête du côté italien le rejoigne sur
les lieux, lequel s'était exécuté en grognant qu'il aurait tout de même pu se
rendre tout d'abord au commissariat pour prendre connaissance du dossier.
Après
avoir ingéré rapidement les différents éléments en possession des autorités
italiennes et avant même d'avoir posé dans le plus bel hôtel de la ville sa
petite valise qui se trouvait encore dans le coffre de sa voiture, l'agent
Hooper demanda à aller au laboratoire souterrain pour voir le lieu du crime.
Ils avaient donc fait un rapide aller-retour au laboratoire souterrain du Gran
Sasso avant de débuter la première série d'auditions des premiers témoins qui
pouvaient être autant de suspects.
***
Cristina
vit débouler deux inconnus avec le gardien de permanence. Elle comprit aussitôt
qu'il devait s'agir de la police ou bien du procureur. Il y avait déjà eu des
visites de ce genre depuis une semaine.
Elle
avait repris le travail avant même que John et Peter ne soient revenus de
Californie. Elle testait l'efficacité de la modification qu'ils avaient faite
ensemble sur le purificateur isotopique le soir même du drame. C'était une
machine qui servait à éliminer le krypton radioactif qui pouvait rester dans
les bouteilles de xénon. Depuis qu'il avait été livré au laboratoire par
l'équipe allemande, ce purificateur ne fonctionnait pas correctement. Pour tout
dire, il faisait l'inverse de ce qu'il devait faire. Il avait tendance à
reconcentrer des particules de gaz extérieur au lieu de les éliminer du flux de
gaz à purifier. Ils utilisaient pour cela une bouteille test de xénon, censé
être représentative du xénon qui remplirait dans quelques semaines le grand
conteneur cryogénique.
Elle
était penchée sur son écran quand elle avait vu les silhouettes entrer dans le
hall B. Instinctivement, Cristina se redressa et se dirigea vers eux. Le
gardien la présenta aux deux hommes comme étant une chercheuse qui travaillait
avec Matthew Donnelly. Après les salutations d'usage dans de telles
circonstances, l'inspecteur Castelli demanda à Cristina si elle avait été au
labo dans la journée du 24 février et si oui à quel moment elle l'avait quitté.
Pendant qu'il lui posait la question, l'agent Hooper la fixait, avec des yeux
grands ouverts comme si il était perdu dans ses pensées ou bien comme s'il
dormait en étant éveillé. Cela lui donnait un visage étrange. Après avoir
répondu à cette première question, en italien, et constatant que l'inspecteur
ne traduisait pas pour l'agent du FBI, elle répéta sa réponse dans son anglais
quasi parfait. Cette fois-ci, ce fut l'inspecteur qui jeta un regard hagard et
Tom Hooper sembla se réveiller soudainement.
Cristina s'en voulait toujours de ne pas avoir
vérifié si Matthew était encore là quand elle était partie ce soir-là. Elle se
sentait coupable. Si elle avait fait un tour dans toutes les annexes de la
manip, tout ça ne serait peut-être pas arrivé. Elle redit à l'agent Hooper
qu'elle avait travaillé longuement ce jour-là et qu'elle était rentrée sur les
coups de 22h30.
— Matthew
Donnelly avait-il des ennemis au sein des chercheurs utilisant le laboratoire
souterrain ? demanda Hooper à Cristina
— Non,
absolument pas, en tous cas pas à ma connaissance... répondit-elle. Mat était
apprécié de tout le monde. Il était toujours très affable avec les autres. Je
n'ai jamais vu la moindre altercation depuis que je le connais et même depuis
que je le croise ici.
—
Qu'entendez-vous par là ? rétorqua l'agent Hooper, qui semblait maintenant être
attentif à chaque mot prononcé.
— Je dois
peut-être vous préciser que cela fait plusieurs années que je travaille ici
dans cette grotte, comme on l'appelle entre nous. Je ne travaille pour XENO1000
que depuis deux ans mais j'étais sur d'autres manips également implantées ici
auparavant, et j'avais déjà eu l'occasion de croiser Matthew avant de
travailler directement avec lui.
— Je
comprends... Matthew Donnelly avait-il des secrets dans son travail ?
— Des
secrets ? Quels genres de secrets ? demanda Cristina, qui ne voyait pas où
l'agent cravaté voulait en venir.
—
Connaissait-il des choses que d'autres personnes auraient aimé savoir ? précisa
Tom Hooper.
— Mat
était spécialiste de la purification du xénon... évidemment, en tant que
spécialiste, il connaissait des petits trucs et astuces... et il nous en
apprenait tous les jours. On n'est pas les seuls dans le monde à travailler
avec du xénon liquide...
— Oui,
mais vous êtes peut-être pas très nombreux à travailler avec du xénon
spécifique à très basse radioactivité, rétorqua Hooper assez sèchement
— C'est
exact. En fait, il n'existe que deux manips dans le monde qui travaillent avec
le même genre de détecteur, nous et LXZ.
— Oui, LXZ,
bien sûr...
— Oui...,
c'est une expérience qui est installée dans une ancienne mine aux Etats-Unis.
Leur détecteur est très proche du nôtre, répondit la jeune chercheuse, qui
était de plus en plus intriguée par les questions de l'agent Hooper.
— OK,
merci... Bon, puisque vous étiez présente ici quelques heures ou minutes avant
le crime, je vous recontacterai très bientôt pour vous auditionner plus
formellement, ajouta Hooper avant de se retourner vers l'inspecteur Castelli et
le gardien en disant bien fort comme s'il s'adressait à un sourd :
— Bien,
maintenant, messieurs, allons voir cette fameuse salle de stockage des gaz!
Cristina
fut quelque peu étonnée de cette entrée en matière. Elle comprit néanmoins
qu'une enquête du FBI avait été lancée rapidement et s'en réjouissait, mais cet
agent Hooper lui paraissait très différent des agents du FBI tels qu'on les
imagine habituellement. Ses questions très directes et sa façon de rebondir
après les réponses données comme si il savait déjà de quoi on parlait...
Cristina,
qui souhaitait suivre au plus près le déroulement de l'enquête, ne put
s'empêcher d'élever la voix à son tour pour demander :
— Puis-je
vous accompagner ? Je pourrais peut-être vous apporter quelques précisions sur
ce qui est stocké ici et ce que faisait Matthew ...
Les trois
hommes la dévisagèrent, et comme elle avait parlé en anglais, seul l'agent
Hooper semblait avoir saisi la totalité de sa requête. Il hocha la tête en
tournant légèrement le menton vers l'inspecteur Castelli, qui acquiesça mollement.
***
Le xénon
n'était pas fabriqué artificiellement à partir d'un autre produit. Il existait
naturellement dans l'atmosphère de la Terre, à raison de 9 atomes pour 100
millions d'atomes d'oxygène, d'azote et de dioxyde de carbone. Il fallait ainsi
juste l'extraire de l'air. Le processus industriel était fondé sur la
liquéfaction de l'air puis la séparation de ses différents constituants. La
méthode était à peu de choses près la même que celle qu'avaient utilisée ses
découvreurs anglais à la fin du dix-neuvième siècle. Outre le xénon, Ramsey et
Travers avaient découvert également le krypton et le néon de la même manière à
quelques semaines d'intervalle.
Et la
méthode, aussi raffinée fut-elle, ne permettait pas de récupérer un xénon
ultra-pur. Il perdurait toujours une petite quantité de krypton qui
accompagnait le xénon ainsi isolé. Des infimes quantités certes mais le krypton
avait la fâcheuse caractéristique de posséder des isotopes radioactifs et ça,
c'était une véritable plaie pour les physiciens avides de pureté radioactive
pour leurs expériences.
Ils
avaient testé différents fournisseurs de gaz nobles sur plusieurs continents
mais ces derniers arrivaient tous environ au même niveau de performance. Les
impuretés du xénon étaient le point faible de la méthode de détection fondée
sur l'utilisation de grandes quantités de xénon liquide. Giovanna Marsi, la
responsable scientifique de l'expérience le savait depuis le début, ainsi que
ses concurrents de l'expérience américaine. Les deux collaborations scientifiques
cherchaient chacune de leur côté le meilleur moyen d'y remédier.
La
disparition de Matthew Donnelly était une énorme perte pour XENO1000 pour
résoudre cette problématique de la purification du xénon en phase liquide.
C'était lui qui avait mis au point le nouveau système de purification qu'ils
avaient fait fabriquer par l'équipe du Max Planck Institute en Allemagne. Il
s'agissait d'un processus très innovant qui, sur le papier, pouvait permettre
d'extraire jusqu'au dernier atome de krypton dans un volume de plusieurs
centaines de litres de xénon.
Le xénon
était liquide soit à très forte pression soit à très basse température,
exactement entre 161 et 165 degrés au-dessus du zéro absolu. C'était un gaz qui
faisait partie de la famille des gaz nobles, il était inerte, avec la
particularité de ne produire aucune réaction chimique. Le xénon pouvait ainsi
laisser passer très facilement les électrons qui y passaient, ce qui était très
intéressant pour les physiciens.
Le xénon
était inodore et incolore, donc indétectable. Alors qu'avec d'autres gaz
inodores on ajoutait un arôme artificiel pour pouvoir détecter facilement
d'éventuelles fuites, un tel ajout dans les bouteillons stockés au laboratoire
souterrain était impensable. On ne pouvait pas se permettre d'introduire des
impuretés sous la forme de molécules organiques complexes odorantes. L'autre
caractéristique du xénon était qu'il possédait de très nombreux isotopes
stables, pas moins de neuf, ce qui constituait un record dans la centaine
d'éléments chimiques recensés dans la table de Mendeleïev.
Les
physiciens avaient choisi le xénon pour détecter des WIMPs car il avait toutes
les caractéristiques optimales. Outre le fait de laisser filer les électrons,
il produisait une scintillation lorsque des particules chargées venaient y
interagir et en plus, il formait lui-même une sorte d'efficace écran contre les
rayons gamma parasites de la radioactivité naturelle dont on voulait se
protéger. En détectant la lumière de scintillation, on pouvait compter le
nombre de particules qui interagissaient dans le volume de xénon liquide durant
une période donnée.
Les
traces de krypton qui posaient problème étaient surtout les isotopes radioactifs
de krypton, c'est à dire les kripton-81 et kripton-85. Ces deux isotopes
radioactifs étaient d'origine très différente. Avec sa période de
désintégration de plus de 200 000 ans, il ne servait à rien d'attendre que le krypton-81
disparaisse tout seul, celui-là était un produit naturel, issu de réactions
d'activation par le rayonnement cosmique, à l'instar de ces cousins du xénon.
Mais le krypton-85, lui, était un pur produit de l'Homme. C'était un
sous-produit de la fission nucléaire de l'uranium ou du plutonium. On en
trouvait dans l'atmosphère terrestre, plus abondamment dans l'hémisphère nord,
là où se trouvait la majorité des centrales nucléaires et où avaient eu lieu la
plupart des explosions nucléaires depuis 1945. Le krypton-85 était très volatil
et se retrouvait facilement dans l'air.
Concrètement, alors que l'on cherchait à voir
des petits éclairs de lumière produits par des WIMPs rebondissant sur les
atomes de xénon, on voyait surtout les petits éclairs lumineux qui étaient
issus du rayonnement béta du krypton-81 et du krypton-85 qui provenaient du cœur
du détecteur.
***
L'une des
premières choses qu'avait demandées Tom Hooper aux policiers italiens avant
même d'arriver à L'Aquila était de relever les traces informatiques des entrées
et sorties du laboratoire souterrain. Il savait que le sas était géré par un
système de badges électroniques relié à une base de données. La police
italienne n'avait pas attendu cet ordre maquillé en suggestion forte ; les
inspecteurs avait déjà entamé la démarche en récupérant les disques durs du
système informatique de gestion du personnel du laboratoire mais ne les avait
pas encore exploités. C'était désormais chose faite au moment où Hooper rentrait
du laboratoire souterrain avec l'inspecteur Castelli juste après son arrivée à
L'Aquila.
— Alors,
ces entrées/sorties ? avait demandé Hooper au débotté.
— Nous
les avons. Et c'est plutôt étrange...
—
Dites-moi donc, avait répondu Hooper.
L'inspecteur
qui avait pris en charge d'envoyer les disques durs à l'analyse et qui
répondait à Hooper dans un anglais quasi scolaire ne lui répondit pas
directement mais se tourna vers Castelli et lui expliqua la situation en
italien, en pensant bien que Tom Hooper n'en comprenait pas un mot. Il y avait
des choses tout à fait anormales dans la base de données qui enregistrait les
entrées et les sorties du laboratoire souterrain. Tout paraissait normal
jusqu'à la date du 22 février, deux jours avant le meurtre. Puis à partir de
cette date, toutes les heures qui apparaissaient, que ce soit pour les entrées
ou pour les sorties, étaient systématiquement inscrites à 0h01. Le jour, lui,
semblait cohérent. Et il y avait pire, alors que chaque personne était
identifiée dans la base par un identifiant, deux lettres et 5 chiffres, à
partir du 22 février, chaque entrée était marquée "AA00000" et chaque
sortie "BB00000".
Tom
Hooper s'impatientait.
—
Pouvez-vous me dire ce que donne cette analyse, messieurs, s'il vous plait ?
Castelli
se tourna vers Hooper.
—
Quelqu'un a sûrement trafiqué le système informatique volontairement.
Tom
Hooper, lors de chaque audition qu'il avait menée par la suite, s'était
toujours bien gardé d'évoquer ce bidouillage informatique, et avait interdit aux
policiers italiens d'en parler. Il avait demandé à ce qu'on lui imprime ce
listing reprenant les identifiants ainsi que les dates et heures de passage. Le
nombre de passages et la date semblaient corrects par rapport aux présences des
chercheurs, sauf ce 24 février.
Tom
Hooper avait très vite réussi à recouper exactement qui avait travaillé ce
jour-là dans la grotte sur la totalité des chercheurs des différentes
expériences qui étaient présents sur le site italien. Le nombre de passages au
niveau de la grande porte d'entrée, qui séparait le tunnel autoroutier du sas
d'entrée du laboratoire, tous marqués avec les identifiants et l'heure
aberrants, était de 43 entrées et 42 sorties, pour 42 personnes connues et
physiquement présentes ce jour-là. Seuls les deux médecins et les deux
Carabinieri avaient pu pénétrer sans badge, conduits par un des deux gardiens.
La sortie manquante était bien évidemment celle de Matthew Donnelly. Une
personne étrangère au microcosme scientifique s'était donc introduite dans le
laboratoire souterrain le 24 février en badgeant en entrant et en sortant. Cela
expliquait également le fait que l’assassin ait eu besoin de trafiquer la
badgeuse.
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